Le principe du coucou

Le principe du coucou

Le principe du coucou
Auteur : Jean-Louis Aisse
Arrangeur : Jean-Didier vander Vorst
Compositeur: Jean-Didier vander Vorst

Ils ont déferlé sur nous, sur nos vies,
Comme un ouragan, un raz-de-marée noir ;
Ils nous ont tout dépossédé, tout pris,
À nous qui ne possédions rien sauf l’espoir ;
Ils arrivaient en maîtres, en conquérants,
Ils avaient la force, ils avaient le nombre ;
Sur notre terre, nos aïeux, nos enfants,
Ils ont déployé le voile de leur ombre ;
Ils ont arboré médailles et drapeaux,
Défilé fièrement sur des airs martiaux ;
Ils n’avaient qu’un mot d’ordre, qu’un va-tout :
Le principe du coucou ;
La scène était comme tirée d’un cauchemar :
Ils fondaient par hordes, par troupes, par nuées
Armées jusqu’aux dents, des meutes de soudards
Qui prenaient nos rues, nos villes, nos contrées ;
Ils foulaient nos champs, brûlaient nos cultures ;
Les chenilles de leurs chars, dominatrices,
Écrasaient nos récoltes, notre blé mûr,
Ruinaient à néant nos patiences complices ;
Ils tiraient sur tout, ils nous faisaient peur,
Prenaient plaisir à semer la terreur ;
Ils n’avaient qu’un mot d’ordre, qu’un va-tout :
Le principe du coucou ;
C’est alors qu’ils se sont mis à détruire :
Ils ont bombardé les lieux de nos cultes,
De notre mémoire et de nos souvenirs,
Ils ont semé partout la même insulte ;
Après ça ils ont emmené les hommes
Vers des lieux d’où ils ne revinrent jamais ;
Ils ont violé nos femmes ad libitum
Et ont massacré quiconque s’opposait ;
C’est ainsi qu’ils ont imposé leur loi,
Qu’ils disaient justifiée par le bon droit ;
Leur mot d’ordre faisait notre licou :
Le principe du coucou ;
Ils avaient des mots étranges à la bouche :
Ils parlaient du pays de leurs ancêtres,
Ils disaient : « Terre Sacrée, Terre Sainte, pas touche,
Ici seules les âmes pures ont le droit d’être » ;
Nous usurpions, tel était notre crime,
Ce qui fut le berceau de leur patrie ;
Ce pays avait d’autres patronymes
Et ils effaçaient le nôtre aujourd’hui ;
Ils massacraient, leur conscience était lisse,
Au nom de l’Histoire et de la Justice ;
Leur mot d’ordre faisait notre licou :
Le principe du coucou ;
Ils avaient des mots étranges à la gorge :
« Peuple élu », « Semence du génie des Dieux »,
« Race supérieure coulée d’une divine forge »,
« Fils de la Lumière, du Royaume des Cieux » ;
Ils ont évoqué d’anciens génocides,
Les temps de souffrance, les temps d’oppression ;
Si nous étions à présent apatrides
C’était pour légitime réparation ;
Ils parlaient de liberté, d’équité,
De paix, de bonheur au bout de l’épée ;
Ils rempliraient leur mission jusqu’au bout :
Le principe du coucou ;
Ils avaient des mots étranges à la lèvre :
Ils parlaient Millénaire et Destinée
Et de sacrifier gaiement pour ces rêves
Nos vies simples qui se comptent en années ;
Ils parlaient de la fierté retrouvée,
Du pays pour lequel battait leur coeur ;
De leur Culture, de leur glorieux passé,
De la pureté qui faisait leur grandeur ;
Il n’y avait que noblesse des sentiments,
Une noblesse écrite en lettres de sang ;
Ils rempliraient leur mission jusqu’au bout :
Le principe du coucou ;
Toujours ces mêmes colonnes de réfugiés,
Ces déportations, ces exterminations,
Ces femmes qui pleurent derrière les barbelés,
Toujours ces gosses en camps de concentration ;
Tous ces possibles aux poubelles de l’Histoire,
Depuis le premier Homme, le premier matin ;
Tous ces crimes pour marquer votre territoire,
À la manière dont se comportent les chiens !
Tel se dresse le bilan, n’est-il pas triste ?
Mais c’est le vôtre, messieurs les nationalistes ;
Voilà les fruits que portent vos principes fous,
Vos principes du coucou ;
« Le nationalisme est le plus court chemin
Entre la connerie et la barbarie,
Il se nourrit sans cesse à ces deux seins »,
C’est ce qu’un ami espagnol m’a dit ;
Avec dans l’oeil vif, intacte une fronde,
Comme un testament il a rajouté :
« Mon unique patrie, vois-tu, c’est le monde,
Et ma seule famille c’est l’Humanité »
C’est pour ça, messieurs les nationalistes,
Que je me suis juré tant que j’existe
De tordre autant que faire se peut le cou
Au principe du coucou.