Au pays des moules

Au Pays des Moules

Au pays des moules (c’est mauvais signe)
Auteur : Jean-Louis Aisse
Arrangeur : Jean-Didier vander Vorst
Compositeur: Jean-Didier vander Vorst

Leur seul sujet de conversation : le temps ;
La météo : nonante pourcent de leur vie ;
Ou bien ils râlent du soleil trop ardent,
Ou bien ils se plaignent parce qu’il fait trop gris ;
De toute façon faut qu’ils rechignent,
C’est mauvais signe, c’est mauvais signe ;

Le samedi ils s’acharnent sur le gazon,
Briquent leur auto comme s’ils se nettoyaient l’âme ;
Poulet du marché et télévision,
Chaque week-end ils appliquent le même programme ;
La vie est un fleuve longiligne,
C’est mauvais signe, c’est mauvais signe ;

Ils célèbrent, en se saoulant à Noël,
Un Dieu auquel ils ne croient pas vraiment ;
À la Saint-Valentin, entre deux chandelles,
Jouent l’amour avec des têtes d’enterrement ;
C’est ça qu’ils appellent « rester digne »,
C’est mauvais signe, c’est mauvais signe ;

Faut voir leurs tronches au volant de leurs bagnoles
Ou quand ils bronzent à la Costa Belga ;
À la sortie des bureaux, des écoles,
« Sourire » est un mot qu’ils ne connaissent pas ;
Ils tirent la gueule sur toute la ligne,
C’est mauvais signe, c’est mauvais signe ;

Bien que dans leur pays il pleuve tout le temps
Il est assez peu de gens qui se mouillent ;
Ils sont bêtes, lâches, petits, indifférents,
C’est pas un hasard si leur plat c’est les moules ;
Il n’est plus rien qui les indigne,
C’est mauvais signe, c’est mauvais signe ;

Ils disent : « C’est une vertu, l’autocritique » ;
Mais ça ne va quand même pas jusqu’à cesser
Leur sempiternelle guéguerre linguistique,
Leurs lamentables querelles de clocher ;
Ce sera sans doute leur chant du cygne,
C’est mauvais signe, c’est mauvais signe ;

« Changer de chaîne, c’est ça la liberté » :
La télé leur inspire cet aphorisme ;
Y a-t-il plus profonde débilité ?
Mais eux ils appellent ça « surréalisme » ;
Breton a baissé de standing,
C’est mauvais signe, c’est mauvais signe ;

L’évidence, tournons pas autour du pot,
C’est qu’ils n’ont aucun projet, qu’ils s’emmerdent ;
Pas de rêve ni d’audace, pas d’idéaux ;
Ils sont fonctionnaires d’une vie qu’ils désertent ;
Et dynamiques comme du pudding,
C’est mauvais signe, c’est mauvais signe ;