La citadelle

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La citadelle
Auteur : Jean-Louis Aisse
Arrangeur : Jean-Didier vander Vorst
Compositeur: Jean-Louis Aisse

Je suis fière et rebelle
M’avais-tu averti;
Ces remparts te rappellent
Qu’au fond je suis meurtrie;

C’est une citadelle
Qu’il te faudra contrer
Si tu veux la passerelle
Vers mon âme déchirée.

Viens me livrer bataille,
Je suis peut-être celle
Qui mettra à ta taille
Ses bras pour citadelle.

Est-ce une citadelle
Qu’il me faut assiéger ?
Mon haleine est sans sel,
Mon souffle fatigué;

Je suis fourbu de cent
Guerres de cent ans et plus
Et je n’ai de mon sang
Qu’un souvenir tout au plus;

Si pour gagner ton coeur
Il faut aux Dardanelles
Se battre avec ardeur:
J’oublie ta citadelle.

Je suis fourbu de cent
Guerres de cent ans et plus;
J’étais Prince charmant,
J’oublie que je le fus;

Il y a des décennies
Qu’est morte en tes paupières
Cette princesse pour qui
On met genou en terre;

Faut-il que l’on s’affronte
En combat rituel ?
Pour ma part j’aurais honte
De t’aimer d’un duel.

Il y a des décennies
Qu’est morte en tes paupières
La lueur qu’irradie
L’alliance des contraires;

Qu’as-tu à protéger
Pour avoir mis d’avance
Autour de toi fossés,
Barbacanes et défenses ?

C’est d’une peur sacro-sainte
Une douleur sans appel
Qu’au fond tu es enceinte,
Que tu es citadelle.

Qu’as-tu à protéger
Pour avoir mis d’avance
Des murailles aux baisers,
Aux gestes la méfiance ?

Faut-il qu’on t’aie fait mal,
Faut-il qu’on t’aie blessée
Pour que tu trouves normal
De vivre retranchée ?

Ta prison est dorée,
Et ton trône éternel;
De réclusion glacée
Se drape ta citadelle.

Faut-il qu’on t’aie salie,
Faut-il qu’on t’aie blessée
Pour étouffer d’oubli
Le rêve que tu portais ?

Et même si ta tonnelle
Regorge d’amitiés
C’est le froid qui constelle
Tes draps si peu froissés.

L’égoïsme pour l’heure
Te semble confortable
(Mais) tu ignores la chaleur
D’un amour véritable.

Et même si ta tonnelle
Regorge d’amitiés
Regarde-toi, ma belle:
Tu es incarcérée.

Quitte ta tour d’ivoire,
Il fait bon se chauffer
Au creux de mes regards
Où c’est souvent l’été;

Et saches que le courage
Pour laisser tes tourelles
Vaudra bien davantage
Qu’abattre une citadelle.

Quitte ta tour d’ivoire
Il fait bon se chauffer
Chez ceux qui aiment à croire
Que l’on peut se parler;

Viens brûler au soleil
Tes exils, tes silences
D’une parole qui réveille,
Ressuscite la chance.

Il est des mots transis
Que l’on écrit au miel
Lancés comme des défis
Aux murs des citadelles.

Viens brûler au soleil
Tes exils, tes silences;
Approche à ton oreille
Un parfum d’espérance

Ce chant est un appel,
Tu ne peux l’ignorer;
Moi je reste fidèle
A ce que j’ai juré;

La solitude s’attarde
Au sein de ton prénom;
Mais dans le mien, regarde,
Scintille un trait d’union.

Auderghem, samedi 23 octobre 1999.